Better Than Any Man # Episode 2
Avec :
- Jean-Philibruge de Brontefark, Lansquenet Niv 1
- Kirsten Frusch, Paysan Niv 1
- Chindler, Monte-en-lâair Niv 1
Nuit et petit matin du 1er au 2 octobre 1631
- Ils ne se connaissaient pas. Pourtant, câest ensemble quâils sâĂ©veillĂšrent, enchaĂźnĂ©s dans la pĂ©nombre dâune cave humide, les poignets meurtris par le fer. Devant eux, des silhouettes encapuchonnĂ©es veillaient, torches Ă la main, le visage masquĂ© de toile grise. CâĂ©taient des membres de la Milice Bourgeoise pour la Paix, ces zĂ©lotes au service des sorciĂšres de Karlstadt. Comment sâĂ©taient-ils retrouvĂ©s ici ?
- Kirsten Frusch, petit paysan craintif, sâĂ©tait attirĂ© la colĂšre des villageois de Werneck pour avoir rĂ©pondu Ă des enfants qui le traitaient de nabot. On lâavait rossĂ©, puis quelquâun lâavait discrĂštement livrĂ© Ă la milice.
- Chindler, monte-en-lâair au verbe facile, qui devait retrouver ses compagnons (voir BTAM #1) Ă Werneck, avait Ă©tĂ© pris la main dans la cassette dâun bourgeois dâune masure perdue.
- Quant Ă Jean-Philibruge de Brontefark, vieux lansquenet borgne, câest aprĂšs avoir fracassĂ© une chope sur le crĂąne dâun ivrogne qui sâĂ©tait moquĂ© de sa tĂȘte « de hachis Parmentier » quâil avait croisĂ© le chemin des miliciens.
- Tous trois, ils sâĂ©taient retrouvĂ©s enchaĂźnĂ©s en file indienne dans la lande, emmenĂ©s avec dâautres malheureux Ă la colline chauve par les miliciens pour la paix. Ces illuminĂ©s leur annonçaient leur prochaine rééducation au quartier-gĂ©nĂ©ral de la milice, lâun dâentre eux, un jeune adolescent aux cheveux blond paille du nom de ThĂ©odor devant les accompagner pour ĂȘtre âinitiĂ©â. ArrivĂ©s face Ă de lourdes portes de pierre Ă flanc de falaise du cĂŽtĂ© nord de la colline abrupte, ils furent remis Ă dâautres miliciens Ă lâair plus sinistre.
- Ils les emmenĂšrent le long dâun couloir, croisant de nombreux miliciens, hommes, femmes et enfants, un village souterrain grouillant dâune humanitĂ© tordue.
- Dans une salle close, les prisonniers furent accrochĂ©s par des chaĂźnes Ă un mur face Ă des instruments de torture que lâhumiditĂ© faisait luire. Le colporteur hurla le premier. Puis le jeune pĂątre. Enfin, le jeune ThĂ©odore, qui devait ĂȘtre "initiĂ©" selon les dires de ses amis de la milice, et qui ne comprenait pas ce dĂ©chaĂźnement dâhorreur alors quâil croyait que le but de la milice Ă©tait de faire rĂ©gner la paix sur terre, fut offert vivant Ă des fourmis gĂ©antes, monstrueuses bĂȘtes quâon gardait dissimulĂ©es derriĂšre un rideau de jute et des barreaux de fer.
- Ce fut Chindler qui brisa le mauvais sort. Alors que les autres Ă©taient sortis et quâil ne restait quâun garde isolĂ©, il lui lança un sourire mielleux, attira son attention, puis dâun geste vif se libĂ©ra et lui frappa la carotide avant dâĂ©craser sa tĂȘte contre le mur. Le sang Ă©claboussa la pierre.
- En hùte, il libéra Kirsten et Jean-Philibruge. Les trois hommes, désormais liés par la peur, jurÚrent de fuir ensemble.
- En espionnant par une serrure de la porte Ă lâEst de la salle de torture, Chindler dĂ©couvrit lâhorreur : dans la piĂšce voisine, des miliciens, hommes, femmes, enfants, dĂ©piautaient des cadavres humains, quâils faisaient cuire dans de grands chaudrons.
- Un plan jaillit dans lâesprit du voleur : il attacha une corde aux barreaux de la cage des fourmis, pendant que ses compagnons se plaçaient prĂšs de la sortie. Kirsten ouvrit discrĂštement la porte du garde-manger oĂč se dĂ©roulait la scĂšne dâanthropophagie. Un tir sec sur la corde, un grincement de mĂ©tal : la cage cĂ©da. Les fourmis sâĂ©lancĂšrent dans la piĂšce, semant la panique. Les trois fugitifs sâenfuirent dans un couloir adjacent et bloquĂšrent la porte derriĂšre eux.
- Ils débouchÚrent dans les latrines du complexe. Là , surprise : une femme, accroupie sur son siÚge, poussa un cri. Jean-Philibruge, sans hésiter, lui décocha un coup de botte en plein visage avant de la faire basculer dans la fosse à purin.
- Sans autre issue, Chindler se laissa glisser dans le conduit dâĂ©vacuation, suivi de Kirsten, aussitĂŽt recouvert dâexcrĂ©ments, puis du vieux lansquenet.
- Dans lâobscuritĂ©, ils sentirent le vent souffler depuis le sud, porteur dâair frais. De lâautre cĂŽtĂ©, une aura lourde, noire, presque vivante, semblait les appeler. Ils choisirent le vent.
- La galerie dĂ©boucha dans une vaste caverne tapissĂ©e de moisissures phosphorescentes, grouillant de formes indistinctes. Ils progressĂšrent Ă travers les spores jusquâĂ apercevoir une sortie, oĂč de larges marches descendaient vers lâextĂ©rieur, couvertes de symboles anciens gravĂ©s dans la pierre. Des voix rĂ©sonnĂšrent au loin, sans doute celles de miliciens, les forçant Ă rebrousser chemin.
- Dans une autre galerie, ils dĂ©couvrirent des amoncellements de glaires acides renfermant des rubis. Mais leur pillage attira un scarabĂ©e gĂ©ant, qui dĂ©vorait dĂ©jĂ le pied dâun malheureux milicien. Distinguant des spores recouvrant la carapace de la bestiole, Chindler lança sa torche sur la bĂȘte : le feu embrasa les spores, et lâexplosion pulvĂ©risa lâinsecte, blessant gravement Chindler avec lui, qui, la chair Ă vif, perdit plusieurs points de dextĂ©ritĂ©.
- Kirsten et Jean-Philibruge, couverts de cendres, revinrent en arriĂšre en direction du cloaque sous les latrines du repaire de la milice mais ils obliquĂšrent dans un boyau Ă lâEst, Ă©blouis soudain par une lueur rougeĂątre. Dans une salle oubliĂ©e, ils dĂ©couvrirent un portail de temple fait de chair et dâos, oĂč se mĂȘlaient des formes humaines et insectoĂŻdes, figĂ©es dans une Ă©ternelle convulsion.
- TerrifiĂ©s, les deux survivants rĂ©solurent de quitter cet enfer, emportant Chindler, et de retourner Ă Werneck, le cĆur lourd et les yeux pleins de visions quâils nâoublieraient jamais.